Elections fédérales : Jack Layton cible de The Gazette & la valse à deux temps d’Amir Khadir

Le NPD est un leurre. Le chant de la sirène à moustache Jack Layton ne doit pas tromper les Montréalais et les Québecois. Dans un éditorial aigre et pas doux, le quotidien anglophone de la métropole, The Gazette, n’y va pas par quatre chemins pour dénoncer la « séduction orange » du Nouveau parti démocratique.

The Gazette rappelle qu’un récent sondage a démontré que les Québécois anglophones seraient tout particulièrement séduits par le NPD. Près de 45% d’entre eux s’apprêteraient à voter pour un candidat ou une candidate du parti de Jack Layton le 2 mai prochain ! Mais la fameuse « révolution orange » dont tout le monde parle ne serait en réalité que le fait de « commentateurs surchauffés », croit savoir le quotidien.

Si les Québécois semblent « enclins à céder à la tentation », écrit l’éditorialiste du journal, ils feraient bien mieux de se méfier « de ce que cache le sourire gagnant de Jack Layton ». Sa « position molle » sur la question de l’unité nationale et « sa récente indulgence envers  les nationaliste québécois qui s’est traduit par une promesse imprudente de rouvrir le débat constitutionnel » sont parmi les arguments avancés par le journal pour dénoncer les artifices de Layton.

Rien ne lui est épargné. Sans même parler du coût des promesses du NPD qui tiennent, selon The Gazette, des « mathématiques vaudous ». Le quotidien anglophone en veut surtout à M. Layton de s’être trop avancé sur la question référendaire, au mépris de la loi sur la clarté référendaire, qui prévoit les modalités en cas de sécession de l’une des provinces canadiennes. Une loi qui vise tout particulièrement le Québec bien entendu.

Si certains arguments avancés dans l’éditorial sont intéressants d’un point de vue politique, d’autres sont nettement moins fairplay, comme ces attaques à l’égard des candidats du NPD:

« Lorsque les élections ont été déclenchées, le NPD manquait de candidats dans la province. La conséquence est que bon nombre de candidats québécois du parti sont des néophytes en politique. Certains sont encore étudiants et d’autres vivent loin de la circonscription où ils sont en lice. Un a même été retrouvé en vacances à Las Vegas en pleine campagne électorale… »

Et The Gazette de conclure:

« Pour ceux qui ont été éblouis par le sourire Layton, un conseil judicieux serait de faire attention à ce que vous souhaitez ».

Amir Khadir, son coeur balance…

Si on attendra le 2 mai au soir pour savoir si les électeurs anglophones du Québec ont entendu les appels à la raison du journal montréalais, ailleurs dans la métropole, le candidat Layton provoque bien d’autres situations surprenantes. Prenez Amir Khadir, par exemple. Le député provincial de Québec Solidaire, parti souverainiste et progressiste, figure politique la plus populaire de la province, hé bien, il est sérieusement embêté. Pour qui doit-il appeler à voter ? Le Bloc québécois ou le NPD ? Entre les deux son coeur balance. Sa fibre souverainiste lui souffle de soutenir les candidats du Bloc québécois, sa sensibilité d’homme de gauche lui fait dire que le NPD peut être la meilleure solution.

En somme, et Jean-François Lisée résume la pensée du député Khadir:

« Si vous avez un député libéral ou conservateur: votez pour le candidat bloquiste ou NPD le mieux placé pour le battre. »

Avec ça, les électeurs sauront quoi faire !

Et puis, il y a ces comtés où le NPD fait de l’ombre non pas aux conservateurs ou aux libéraux mais au Bloc québécois lui-même. La situation devient alors plus complexe.

Tiens, prenons Rosemont Petite-Patrie par exemple. Le député fédéral Bernard Bigras est bloquiste et Amir Kadhir « l’adore ». Sauf que le candidat du NPD Alexandre Boulerice, « souverainiste et progressiste », plaît également beaucoup au porte-parole de Québec Solidaire. Alexandre Boulerice se définit lui-même comme un sympathisant de la formation de M. Khadir. Et donc ? Que se passe-t-il ? Sachant que Bernard Bigras est un député apprécié et qu’Alexandre Boulerice est un candidat séduisant, comment choisir ? En votant NPD, les électeurs peuvent-ils affaiblir le BQ au point de faire le jeu des libéraux ou des conservateurs ? Cruel dilemme.

Dans Les Nouveaux cahiers du socialisme, François Cyr et Pierre Beaudet, de Québec solidaire, proposent une analyse intéressante de la situation,  même s’ils ne sont pas prêts à signer un blanc-seing au NPD. Loin s’en faut.

« Voter NPD peut s’inscrire dans une approche stratégique qui vise à affaiblir la droite et même à empêcher Harper de con­stituer un gou­verne­ment majori­taire. »

Plus loin:

« L’appui au NPD n’a pas grand-chose à voir avec l’élaboration d’une alter­na­tive de gauche. Au Québec en tout cas, celle-ci a un nom et cela s’appelle Québec sol­idaire. Le NPD, et c’est peut-être mal­heureux pour cer­tains, n’a rien à voir avec cela. »

Jack Layton (NPD), photo officielle.

Et encore plus loin, à propos de la possibilité que le Bloc Québécois sorte affaibli du scrutin:

« Pour autant, on com­prend les électeurs de gauche au Québec qui sont ten­tés de voter pour Jack et ses can­di­dats. Mais atten­tion ! Le sig­nal pro­gres­siste qui sera envoyé en votant NPD pour­rait être per­verti si cela affaib­lit l’opposition à Harper. Une défaite impor­tante pour le Bloc serait une vic­toire non seule­ment pour Harper mais pour l’ensemble des dom­i­nants au Canada. »

Layton fait trembler la « droite ». Layton fait trembler la « gauche ». Pour autant, le grand méchant NPD peut-il à lui seul rebattre à ce point les cartes de la politique canadienne ? La réponse dans trois jours.

Illustration: photo officielle de Jack Layton.

A lire aussi:
 Bernard Bigras, député de Rosemont, peut-il perdre son siège ?
► La face de Boulerice incrustée sur la rétine