L’écoute de la musique serait aussi stimulante que la cocaïne (à lire également dans l’Itinéraire)
Comment expliquer l’émotion et parfois même les frissons qui parcourent le corps à l’écoute de tel ou tel morceau d’opéra, de rock ou de musique classique ? La réponse, des chercheurs de l’Université McGill de Montréal l’ont trouvée en étudiant les effets produits par la musique sur l’activité cérébrale. Dans une étude récente publiée dans le magazine Nature Neuroscience, ils ont démontré que le cerveau réagissait (un article publié dans l’Itinéraire du 15 avril 2011) à l’écoute de la musique de la même manière que s’il s’agissait d’un mets apprécié ou d’un drogue psychoactive du type cocaïne.
« Le plaisir intense procuré à l’écoute de la musique provoque dans le cerveau une libération de dopamine », explique Valorie Salimpoor, de l’Institut neurologique de Montréal, qui a conduit ces travaux. La dopamine est cette molécule chimique du « système de récompense » qui participe au contrôle et à l’équilibre de certains processus indispensables à l’être humain (l’alimentation) mais qui est également impliquée dans les phénomènes d’addiction et de dépendances (drogues).
« Les êtres humains sont capables de prendre du plaisir à l’aide de stimuli abstraits, tels la musique ou l’art, poursuit Valorie Salimpoor. Or, ils ne sont pas directement indispensables à la survie de l’espèce, comme l’alimentation. Nous savons que la musique peut effectivement provoquer des situations émotionnelles très agréables ou intenses, mais comment l’expliquer de façon scientifique ? » Comment se met en marche ce système de récompense si particulier. Comment mesurer l’émotion, phénomène subjectif difficile à évaluer ?
Les chercheurs ont sélectionné une dizaine de volontaires âgés de 19 à 24 ans qui avaient déjà éprouvé des « frissons », indice de plaisir objectif, en écoutant de la musique. Les volontaires sont venus avec leurs propres musiques, des morceaux sans paroles, mais qui avaient une fois au moins provoqué chez eux une émotion intense. Jazz, musique classique, heavy metal, opéra, chanson française, électro… Un morceau a particulièrement marqué les participants : Adagio for strings de Samuel Barber, une œuvre dont les crescendos dramatiques d’instruments à cordes ont provoqué l’adhésion des volontaires.
Booster de dopamine
A l’aide de différents appareils d’imagerie et de capteurs, les chercheurs ont ensuite mesuré à la fois la sécrétion de dopamine et les effets « physiques » perçus chez les volontaires : accélération des rythmes cardiaque et respiratoire, température corporelle, frissons épidermiques, etc. Certains ont connu des augmentations significatives de leurs taux de dopamine. Jusqu’à +22% ! L’équipe de Valorie Salimpoor et Robert Zatorre a également constaté que la dopamine était sécrétée à deux moments distincts. Par anticipation d’une récompense attendue, dans l’attente du plaisir lié à l’écoute de la musique, d’une part, et au moment même où le plaisir est atteint, d’autre part.
Les chercheurs de l’université McGill pourraient pousser plus loin leurs investigations en s’intéressant à l’effet produit par des musiques que les volontaires ne connaîtraient pas. Et ainsi essayer d’évaluer si l’addiction de l’être humain à la musique est belle et bien réelle ! « Quelle contribution pourrait avoir la musique à la survie de l’espèce humaine ? interroge Patrick Bermudez, chercheur en psychologie à l’Université de Montréal. On pourrait y voir une forme de contribution indirecte, mais qui n’en demeure pas moins cruciale du point de vue du plaisir qu’en retire l’individu ».
« Nos résultats aident à expliquer pourquoi les expériences musicales sont aussi valorisées dans les sociétés humaines, prolonge Valorie Salimpoor, et comment la musique peut être efficace pour manipuler les émotions ». Le cinéma ou la publicité par exemple n’ont pas attendu les résultats de cette étude pour en user et parfois même en abuser.
► Le site du magazine l’Itinéraire
Je n’en doute pas la musique est un plaisir a consommer sans modération. La musique peut nous inspirer, nous donner des sensations… On pourrait même l’utilisé en tant que O.P.E. car elle nous stimule…
En y réfléchissant, je réalise que les sourds n’ont donc pas cette chance. Ça me fait demander si on ne devrait pas légaliser la cocaïne pour les personnes sourdes ?
La question mérite d’être réfléchie…