« Le barbecue est une manière de vivre »
En hiver, le sport national au Canada est le hockey. En été, c’est le barbecue. Sur chaque balcon, dans chaque jardin, les Québécois ont installé de redoutables machines de guerre. Tout y passe, brochettes, côte de boeuf, poivrons, fenouils, poissons… Il paraît même que lorsqu’ils n’ont pas la place sur leurs balcons, certains ont inventé des systèmes pour les suspendre !
Nous avons donc franchi le pas à notre tour. Nous avons racheté l’engin de notre voisine sur le départ. Un barbecue modeste par sa taille mais qui, pour une première acquisition, nous a semblé suffisant. Chaque chose en son temps, me suis-je dit, observons avant d’aller plus loin. Le barbecue est-il un signe ostentatoire de réussite sociale ? Comme la bagnole, comme un bon gros 4×4 ? Le mâle place-t-il sa virilité dans son barbecue ? Dur à dire pour l’instant…
En même temps, je ne me sentais pas d’assumer un Coleman Even-Heat 4-burner à 650$ chez Canadian Tire (photo ci-contre). Sans compter que je n’aurais jamais pu me le payer. Pourtant, c’est un peu la Rolls du barbecue cette affaire-là, du genre qui ne peut pas être manipulé sans une fourchette thermomètre à barbecue numérique (si si…)
La fiche technique du Coleman est à tomber par terre. Du très lourd:
- Barbecue avec surface de cuisson : 680 po2, capacité de 28 burgers
- 3 brûleurs en inox Eventemp assurent une répartition uniforme de la chaleur et réduisent les flambées
- Total BTU : 69 000, surface principale : 56 000 BTU et latérale 13 000 BTU
- Grille en acier
- Allumage électronique Instastart fiable et sécuritaire Thermomètre et rangement sous le grill
- Jauge indique la quantité de propane restant dans la bouteille
- Brûleur latéral, thermomètre et rangement sous le grill, crochets à ustensiles et paniers
- Accessoires offerts, non compris : housse de barbecue (85-1924) et tournebroche (85-1846)
- etc.
On peut aussi regarder une petite vidéo très pédagogique en cas de doute. Mais non, décidément, je ne boxe pas dans la catégorie du Coleman à 650$.
« La gastronomie est un art du quotidien »
Avec de tels engins, le charbon de bois n’a plus d’avenir (en même temps, avec ou sans barbecue, ce n’est pas vraiment un scoop…) Plus besoin de s’y prendre deux heures à l’avance pour le mettre en marche, en moquant au passage la personne qui en a la charge. Les cubes allume feu et tous les trucs de démarrage n’ont plus de raison d’être. Seuls prévalent désormais l’allumeur électronique et la bouteille de propane (45$ environ). Clac, clac sur le bouton et, fruuut, la flamme jaillit. Comme sur n’importe quelle cuisinière en définitive, sauf que, là, c’est à l’extérieur que ça se passe. Dehors. Dans le jardin. Sur le balcon.
Dans le numéro d’été de Le Must, un magazine consacré à la gastronomie, il y a un portrait-interview du « gourou du barbecue » M. Steven Raichlen en personne, auteur de La Bible du Barbecue et anthropologue de formation (qui, au passage, utilise le charbon).
Le « grillardin » y rappelle la place du feu dans l’histoire de l’humanité, l’âtre, le foyer. Dont le barbecue ne serait que la forme moderne. Et peut-être même la plus aboutie si l’on songe au Coleman 4-burner…
Extrait à propos de la « bouffe » d’abord :
« De tous les arts, la gastronomie est sans doute celui qui demeure le plus personnel. Au-delà de la peinture, de la musique, du cinéma ou de l’écriture, la cuisine est pratiquée par tous, partout, en tout temps. C’est un art du quotidien, nécessairement un art de la rue, un art que s’approprient les gens et pour cette raison, il est extrêmement révélateur. »
Sur le barbecue ensuite:
« Le barbecue c’est non seulement une méthode de cuisson, mais une manière de vivre. »
Bon. Je ne suis pas certain d’avoir mis autant de sens dans mon barbecue de samedi dernier. Je crois bien d’ailleurs que les poivrons, aubergines et côtelettes d’agneau passés au grill ce soir-là n’y ont vu que du feu…